Modification du régime de souscription d’un pret par le syndicat par la Loi du 22 mars 2012: articles 26-4 à 26-8

Professeur Christian ATIAS Avocat

1.- La loi n° 202-387 du 22 mars 2012 ajoute, à la loi n. 65-557 du 10 juillet 1965 portant statut de la copropriété des immeubles bâtis, les articles 26-4 à 26-8. La souscription d’un emprunt par un syndicat de copropriétaires est rendue beaucoup plus difficile, voire impossible en fait.

Les dispositions nouvelles n’entreront en vigueur qu’à l’expiration d’un délai de deux mois à compter de la publication du décret prévu pour en fixer les modalités de mise en œuvre (art. 103-II et III, L. 22 mars 2012).

2.- Il n’est pas douteux que la personnalité morale du syndicat lui permet de souscrire un emprunt pour le financement des travaux de conservation et d’entretien ou de réparation de l’immeuble, voire pour les besoins de l’administration des parties communes. Les dépenses qui en résultent constituent des charges communes (Cass.3ème civ., 28 mai 2002, n° 01-03.119.- Cass.3ème civ., 14 décembre 2004, n° 03-17.731.- Paris, 14ème Ch., 16 juin 1995, Loyers et coprop. 1995, n. 438.- Paris, 23ème Ch. B, 14 décembre 2000, Loyers et coprop. 2001, n. 152).

Il avait même été assez curieusement admis que le syndic peut recevoir, d’une décision d’assemblée générale, mandat d’engager personnellement les copropriétaires intéressés envers la banque qui leur consent un prêt, alors que le syndic n’est nullement le mandataire des copropriétaires et que la majorité ne peut lui conférer un tel mandat (Cass.3ème civ., 2 février 1994, n° 92-12.343.- Cass.3ème civ., 6 juillet 1994, n° 92-16.243.- Cass.3ème civ., 7 décembre 1994, n° 93-11.636) ; cet étrange pouvoir de représentation serait confirmé par l’engagement individuellement souscrit par chacun des emprunteurs.

La distinction s’impose entre le prêt souscrit par le syndicat et celui qui l’est par les copropriétaires individuellement. Le pouvoir, conféré au syndic, d’engager ceux-ci ne vaut pas pouvoir d’engager le syndicat (Cass.3ème civ., 2 février 1994, n° 92-12.343.- Cass.3ème civ., 6 juillet 1994, n° 92-16.243.- Cass.3ème civ., 7 décembre 1994, n° 93-11.636.- Aix-en-Provence, 4ème Ch. A, 20 février 2009, n° 2009/66).

3.- Le nouvel article 26-4 subordonne, en principe, la souscription d’un emprunt bancaire au nom du syndicat à la décision de l’unanimité des voix des copropriétaires, lorsqu’il est destiné à financer des travaux régulièrement votés sur les parties communes, voire sur les parties privatives s’ils sont « d’intérêt collectif ». C’est dire qu’en fait, un tel emprunt ne pourra pratiquement plus être souscrit.

4.- La souscription d’un emprunt bancaire au nom du syndicat, pour financer des travaux régulièrement votés sur les parties communes, voire sur les parties privatives s’ils sont « d’intérêt collectif », ou encore des actes d’acquisition entrant dans l’objet du syndicat, peut être voté à la majorité requise pour décider de réaliser ces travaux ou ces acquisitions, dans un cas particulier. La majorité peut statuer si le prêt ne doit bénéficier qu’aux copropriétaires décidant d’y participer.

Ces derniers doivent notifier leur décision au syndic, en précisant le montant de l’emprunt qu’ils entendent solliciter. Un délai leur est imposé ; il est de deux mois à compter de la tenue de l’assemblée pour les copropriétaires qui n’ont été ni opposants, ni défaillants et à compter de la notification du procès-verbal pour les autres.

Le syndic ne peut signer le contrat de prêt qu’après l’expiration du délai légal de deux mois imparti aux copropriétaires pour contester la décision majoritaire (art. 26-5). Ce délai prend ainsi un caractère suspensif qui lui est généralement refusé. Le montant du prêt est versé par la banque prêteuse au syndicat représenté par le syndic.

5.- Le montant de l’emprunt versé au syndicat ne peut excéder le total des parts indivises des copropriétaires qui décident d’y avoir recours. Ils sont seuls tenus de contribuer au remboursement en fonction de leur participation à l’emprunt et de la répartition des charges communes résultant des articles 10, 10-1 et 30 de la loi, ainsi qu’au paiement des intérêts, frais et honoraires, dans la même proportion (art. 26-6).

6.- Une garantie bénéficie au syndicat pour le cas de défaillance du copropriétaire bénéficiaire de l’emprunt (art. 26-7). Il s’agit d’un cautionnement solidaire sans franchise et sans délai de carence. Il doit être fourni par un organisme d’assurance agréé par un établissement bancaire ou par une institution spécialisée (art. L. 518-1 C. mon. et fin.)

Le remboursement de la caution repose sur sa subrogation au syndicat.

Il avait été jugé que, parce qu’il ne constitue pas une charge commune, le remboursement anticipé d’une part du capital, dû en cas de cession de lot, n’est pas garanti par le privilège spécial de l’article 2103 du Code civil (Cass.3ème civ., 15 mai 2002, n° 00-19.832, Bull. civ., III, n. 103 : art. 19-1, L. 65). Désormais, le privilège de l’article 2374-1° bis du Code civil couvre les sommes dues.

7.- En vertu de l’article 26-8, les sommes dues sont rendues immédiatement exigibles par l’aliénation du lot, sauf accord du nouveau copropriétaire pour que la charge lui soit transmise et acceptation du prêteur et de la caution. Le notaire est chargé d’informer le syndic de ces accords.

Droit de la copropriété : Honoraire d’avocat et résultat – 02/04/2015