L’actualité en droit social vue par le cabinet HAWADIER et ASSOCIES

Port du voile islamique au travail : Affaire BABY-LOUP la Cour de Cassation a définitivement tranché

 

Le licenciement pour insubordination de la directrice adjointe de la crèche ayant refusé de retirer son voile était-il nul ?

 

La Cour a rejeté le pourvoi de la salariée rappelant que selon les dispositions des articles L. 1121-1 et L. 1321-3 du Code du travail , les restrictions à la liberté du salarié de manifester ses convictions religieuses doivent être justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché. Elle nous dit qu’en l’espèce, cette petite crèche en relation avec parents et enfants et participant à une mission de service public pouvait restreindre le droit de porter le voile au travail.

 

Attention, la Cour ne se prononce pas pour des entreprises non chargées d’une mission de service public. N’y voyons pas là une application systématique du principe de laïcité à tout le monde du travail !

(Cass. ass. plén., 25 juin 2014, n° 13-28.369)

 

Notons l’arrêt de grande chambre de la Cour Européenne des Droits de l’Homme du 01/07/14 qui estime que la loi interdisant le port du voile dans l’espace public (11/10/11) n’est pas contraire à la Convention Européenne des Droits de l’homme.

 

La Cour précise que l’interdiction du port du voile, si elle ne peut pas être absolue, doit être proportionnée au regard de la notion pour le moins subjective du « vivre ensemble ». Le caractère ostentatoire du signe religieux n’est donc pas le critère. La limite est le seuil de tolérance de la société elle-même. A une telle logique, aucun principe qu’il fut religieux ou moral ne résiste. A suivre avec attention.

 

Effets d’une démission intervenue au cours d’une action en résiliation judiciaire

 

La Chambre Sociale de la Haute Cour vient, dans un arrêt inédit rendu le 30 avril 2014, de décider dans l’hypothèse où la résiliation est intervenue en cours de procédure, le Juge ne statuera pas sur la demande de résiliation mais pourra en revanche accorder des dommages et intérêts si « les griefs invoqués à l’appui de la demande de résiliation étaient justifiés ».

 

Toutefois, si le salarié en fait la demande, le Juge aura à statuer non pas sur la résiliation car elle est sans objet mais sur la prise d’acte. Dans cette seconde hypothèse, il prendra en considération les griefs invoqués y compris postérieurs à l’introduction de l’action en résiliation. On connait en suite les conséquences attachées à la prise d’acte.

 

Cet arrêt ouvre les portes de nouvelles stratégies procédurales aux salariés.

 

Modification unilatérale de la rémunération et Résiliation du contrat : Décision importante !

 

Dorénavant, en cas de modification unilatérale d’un élément substantiel tel la rémunération, la résiliation ne sera justifiée que si le salarié rapporte la preuve que la poursuite du contrat est devenue impossible.

 

Dans la première espèce, la Cour relève que le changement des modalités de rémunération n’a pas exercé « une influence néfaste sur le montant perçu ».

(Cass. soc., 12 juin 2014, n° 13-11.448, M. c/ S. : JurisData n° 2014-012832 )

 

Dans la seconde, il fut considéré que la modification portait sur une « faible partie de la rémunération ».

(Cass. soc., 12 juin 2014, n° 12-29.063, M. c/ M. : JurisData n° 2014-012814 )

 

Il faudra donc désormais pousser les juge du fond à se prononcer sur le caractère influent de la modification ou sur sa proportion pour prononcer valablement des résiliations de contrat. Cette solution semble transposable à l’appréciation des torts dans le cadre d’une prise d’acte de la rupture du contrat.

 

Création du statut du stagiaire :

Une proposition de loi votée et dont l’entrée en vigueur est prévue pour la rentrée 2015 prévoit un statut protecteur du stagiaire en entreprise et dispose notamment :

 

  • Un stagiaire ne peut en aucun cas remplacer un salarié ou occuper un poste à pourvoir
  • Leur nombre sera limité
  • Droit à congés, salaire revalorisé
  • Encadrement du temps de travail
  • Désignation d’un tuteur
  • Possibilité de requalification en contrat de travail devant le Conseil des Prud’hommes sans préalable de conciliation

Obligation de formation : sur qui pèse t’elle ?

 

L’article L. 6321-1 du Code du Travail pose l’obligation pour l’employeur de veiller à l’adaptation des salariés à leurposte de travail et de veiller au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment, de l’évolution des emplois, des technologies et des organisations.

 

La Cour de Cassation a eu à traiter du cas de plusieurs salariés de plus de 2 ans d’ancienneté qui ont reproché à l’employeur d’avoir manqué à son obligation de formation.

 

L’employeur a pensé s’exonérer en arguant du fait que les salariés n’avaient jamais sollicité la moindre formation durant plusieurs années.

 

La Haute Cour ne l’a pas suivi et rappelle que seules les initiatives de l’employeur étaient à prendre en considération.

 

Salariés, ne demandez rien ! Employeurs, soyez un bon patron et proposez des formations !

(Cass. soc., 18 juin 2014, n° 13-14.916, M. c/ M. : JurisData n° 2014-013599 )

 

Attention nouvelles règles de l’ordonnance n° 2014-699 du 26 juin 2014 :

 

Obligation d’information par affichage : le vent des nouvelles technologies souffle et les obligations d’information sont dorénavant exécutées « par tous moyens » . Peut-on entendre par là l’Intranet, le mail, la page facebook de la société ? Il est maintenant question de diffusion et non plus d’affichage.

 

Délai de prévenance et période d’essai : sauf lorsque le salarié commet une faute grave, l’employeur qui ne respecte pas le délai de prévenance lors de la rupture de la période d’essai doit une indemnité égale au montant des salaires et avantages que le salarié aurait perçu jusqu’à l’expiration de ce délai.

 

Opposabilité de la période d’essai

 

Dans cette espèce, une promesse d’embauche en CDD ne prévoyait aucune période d’essai. Le contrat signé en a institué une. Le contrat a été rompu moins d’un mois après sa signature.

 

Le salarié prétendait que n’étant pas prévue dans la promesse d’embauche, la clause de période d’essai du contrat ne lui était pas opposable. La Cour rejette le pourvoi.

 

La commune intention des parties était claire et non équivoque en l’espéce.

(Cass. soc., 12 juin 2014, n° 13-14.258, F. c/ S. : JurisData n° 2014-012808)

Séquestration de l’employeur par des grévistes = faute lourde

Le salarié qui a participé à la séquestration de son employeur qui n’a pu être libéré que par les forces de l’ordre commet une faute lourde. Cela parait si évident qu’il fallait tout de même que la Cour de Cassation le rappelle !

(Cass. soc., 2 juill. 2014, no 13-12.562)

 

Réintégration du salarié protégé mis à pied en cas de refus de l’inspection d’autoriser le licenciement

Le salarié protégé était, en l’espèce, un cadre soupçonné de harcèlement et fut mis à pied. L’inspection du travail n’a pas autorisé le licenciement et a ordonné la réintégration, décision confirmée par le Ministre. La réintégration doit être intégrale et le salarié doit donc retrouver son poste et ses subordonnés, prétendues victimes, doivent de nouveau travailler avec lui.

 

La Cour de Cassation rappelle que le juge judiciaire ne dispose d’aucune marge de manœuvre.

 

Les employeurs doivent donc redoubler de prudence et solliciter l’autorisation de l’inspection le plus rapidement possible pour ne pas se retrouver dans ce genre de situation particulièrement inconfortable…

(Cass. soc., 24 juin 2014, n° 12-24.623)